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Cabinet Comptable Antoine Ghigo

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Étude > Le marché du 3e âge

Le marché du 3e âge

1 - Les chiffres de la vieillesse
2 - Services à domicile ou hébergement collectif : un choix de société
3 - Les services à domicile
4 - L’hébergement collectif

Actuellement il est d’usage de prendre sa retraite aux alentours de 60 ans, soit encore vingt à quarante années à vivre. Que l’on soit alors qualifié de « vieux », « retraité », « 3e ou 4e âge », il faut en tout état de cause prendre en compte de nombreux facteurs qui donneront un sens particulier aux périodes traversées entre 60 ans et la fin de vie. Il semble alors plus juste d’associer âge et notion de validité ou de handicap, qui peut faire basculer un alerte senior dans le camp des personnes dépendantes. Tout entrepreneur se gardera donc de généraliser son offre et devra considérer les particularités propres à chaque âge de la vieillesse afin de s’adapter à la population visée.

1 - Les chiffres de la vieillesse

L’espérance de vie s’est considérablement élevée dans notre pays au cours des cinquante dernières années. De 69,2 ans en 1946 pour les femmes, elle est passée à 82,5 ans en 1998. Cette même année, elle n’était que de 74,2 ans pour les hommes, au lieu de 63,4 ans en 1950. Le tableau ci-dessous montre l’évolution de l’espérance de vie à divers âges depuis 1994.


Évolution de l’espérance de vie à divers âges depuis 1994
Année Hommes Femmes
0 an 1 an 20 ans 40 ans 60 ans 0 an 1 an 20 ans 40 ans 60 ans
1994 73,6 73,1 54,6 36,3 19,7 81,8 81,3 62,6 43,3 25,0
1996 74,1 73,5 54,9 36,4 19,7 82,0 81,4 62,6 43,3 25,0
1997 74,5 73,9 55,3 36,7 19,9 82,3 81,6 62,9 43,5 25,2
1998 74,7 74,1 55,5 36,8 20,0 82,4 81,7 63,0 43,6 25,3
1999 74,9 74,3 55,7 37,0 20,2 82,5 81,8 63,1 43,6 25,3
2000 75,2 74,6 56,0 37,2 20,4 82,8 82,1 63,3 43,9 25,6
2001 75,4 74,8 56,2 37,4 20,6 82,9 82,2 63,5 44,0 25,7
2002 75,7 75,1 56,4 37,6 20,8 83,0 82,3 63,5 44,1 25,8
2003 75,8 75,2 56,5 37,6 20,8 82,9 82,2 63,4 43,9 25,6
2004 (p) 76,7 76,0 57,3 38,4 21,4 83,8 83,1 64,3 44,8 26,4
2005 (p) 76,7 76,0 57,3 38,4 21,4 83,8 83,1 64,3 44,7 26,4
Champ : France entière (métropole et départements d’outre-mer). (p) Résultats provisoires. Lecture : en 2000, l’espérance de vie des hommes de 60 ans est de 20,4 ans. Ce chiffre représente le nombre moyen d’années restant à vivre aux hommes de 60 ans avec les conditions de mortalité à chaque âge observées en 2000.
Source : Bilan démographique 2005, Insee.

La surmortalité masculine reste importante, même si l’on note depuis quelques années une tendance à la réduction de l’écart entre hommes et femmes. Si le quotient de surmortalité des hommes tombe à 1,5 à 84 ans, il est de 2 à 70 ans et de 2,5 à 60 ans. D’où une constante, qui illustre l’offre destinée au 3e âge : qu’il s’agisse de soins à domicile ou d’hébergement collectif, la population prise en charge est féminine à 80 % en moyenne. Dans les institutions pour personnes âgées, les femmes sont trois fois plus nombreuses que les hommes. Après 85 ans, elles le sont cinq fois plus.

1.1 - Les retraités : une population hétérogène

Parler de « personnes âgées » comme d’un groupe homogène serait une erreur. En effet, selon l’âge, le sexe, la situation financière et le degré de dépendance, il convient de connaître précisément la frange de population à qui l’on s’adresse. Plusieurs classifications ont été faites, qui vous permettront d’affiner votre démarche entrepreneuriale.

Un essai de classification : quatre groupes de retraités

- Celui de la retraite active (24 %), dont l’importance devrait augmenter avec l’arrivée des nouvelles générations. Il se compose de personnes – n’ayant plus d’enfants à leur charge – aisées, cultivées, qui voyagent, sont consommatrices de loisirs et dépensent pour leur apparence.
- Celui de la retraite heureuse, familiale et ludique (22 %), centré sur la famille, les petits-enfants et les relations entre générations.
- Celui de la retraite repos (28 %), qui connaît une activité manuelle ou intellectuelle, toujours paisible, et qui axe ses dépenses sur la santé et l’alimentation.
- Et enfin ceux de la retraite repli (12 %) et de la retraite malheur (14 %), composés de personnes peu aisées qui vivent très modestement, voire dans le plus parfait dénuement.

Un classement selon les comportements d’achats

On retrouve une autre qualification, dans l’étude qualitative de la régie Interdeco (magazine Notre temps), qui identifiait, en 2002, trois segments de population suivant leurs comportements d’achats.

Les « Chacun chez soi »
Ce sont les retraités casaniers, gros consommateurs de télévision, réticents à l’innovation ; ils passent une grande partie de leur temps chez eux et sortent principalement pour faire le tour des commerçants de leur quartier. Leur principal lien avec l’extérieur, outre la télé, est constitué par des visites régulières de leurs enfants et/ou petits-enfants pour lesquels ils « mettent les petits plats dans les grands ».

Les « Home sweet home »
Ils sont plus tournés vers le monde extérieur et sont au fait de l’actualité. Ce sont des épicuriens : jardinage, bricolage et famille sont les trois mamelles de leur univers. Ils pratiquent le « cocooning actif ». Alors qu’ils représentaient près de 33 % en 1992, ils ne sont plus aujourd’hui que 25 % des seniors.

Les « Vive la vie »
Ils représentent 47 % des Français de plus de 50 ans (alors qu’ils n’étaient que 41 % en 1992) et constituent le groupe le plus actif, le plus dynamique, aux occupations multiples. C’est le groupe le plus consommateur des plus de 50 ans. Ils devraient jouer un rôle important dans les années à venir. Ils sont au fait de tout, s’informent sur tout par le biais de nombreux magazines, voyagent vers des destinations lointaines ; bref, ils croquent la vie à pleines dents. Ils dépensent plus et mieux que la moyenne des 25-34 ans sur la majorité des postes de consommation. Près d’un Français sur deux âgé de plus de 50 ans a aujourd’hui cette mentalité : la retraite doit se vivre comme une seconde jeunesse... Et, en 2015, un consommateur sur deux sera senior. En somme, 75 % des plus de 50 ans vivraient, selon l’Insee, plutôt bien leur retraite.

Classement selon les âges

Il convient aussi de classer les personnes âgées en fonction de leur âge.
Le passage à la retraite
L’image du vieillard misérable s’est peu à peu estompée au profit de celle du retraité actif, dynamique et solvable. Il en résulte une attitude plutôt positive vis-à-vis du passage de l’âge actif à celui de la retraite, comme en témoigne le tableau ci-dessous.

Périodes de passage à la retraite selon la situation et l’état de santé
Situation au moment du départ à la retraite Appréciation globale
Bonne période Mauvaise période Période ni bonne ni mauvaise Total
En couple
Oui 42 7 51 100
Non 28 16 56 100
A des petits-enfants  
Oui 40 10 50 100
Non 34 7 59 100
État de santé
Problèmes de santé ayant des conséquences sur la vie quotidienne 38 15 47 100
Sans problème de santé important 39 7 54 100
Ensemble 39 9 52 100
Source : Enquête « Histoire de vie - Construction des identités » 2003, Insee.

L’allongement de la durée de vie, la revalorisation des pensions, l’abaissement de l’âge de cessation d’activité se sont traduits par l’apparition d’une nouvelle catégorie de retraités, dite active, et donc dépensière. Les personnes âgées actives peuvent bénéficier de services que la génération précédente aurait considérés comme un luxe : travaux ménagers, courses livrées jusqu’à la cuisine...
Pour les retraités ouverts sur la vie sociale et culturelle, la retraite est synonyme d’une vie sociale et intellectuelle. Ils voyagent, rencontrent des amis, lisent plus de journaux que la moyenne de la population et ne se plaignent pas d’une réduction excessive de leur mode de vie.
Les générations issues du « papy-boom », à la retraite entre 2005 et 2010, n’auront pas du tout les mêmes comportements que leurs aînés. Plus instruits, plus curieux, moins dociles et relativement plus fortunés, les « nouveaux vieux » seront certainement plus exigeants sur la qualité des prestations qui leur seront proposées. C’est le passage de l’état de patient passif à celui de consommateur avisé.

Du troisième au quatrième âge

La fin du xxe siècle a accouché d’une nouvelle catégorie de population, dite du quatrième âge, qui recouvre les personnes âgées de plus de 83 ans. Celles de 80 ans et plus, âge auquel la prévalence de la dépendance commence à augmenter rapidement, seront 4 millions en 2020 (soit 80 % de plus qu'en 2000) et 7 millions en 2040 (soit plus de trois fois plus qu’en 2000).
De même, notre pays comptait une centaine de centenaires en 1900, environ 200 en 1950 et on en recense plus de 11 000 aujourd’hui. Ils pourraient être 165 000 en 2050, date à laquelle l’Insee prévoit que les femmes vivront en moyenne 90 ans et les hommes 80. Le vieillissement de la population française s’accompagne du cloisonnement des générations (on vit de moins en moins avec les grands-parents). Dès lors, l’accession au grand âge d’un nombre croissant de personnes pose et posera de plus en plus de sérieux problèmes de société. Comment assurer à tous les meilleurs soins ? Comment offrir à chacun une vie décente dans des conditions de confort et de sécurité satisfaisantes ? Des projections qui suscitent un certain nombre d’interrogations.
L’émergence d’un quatrième âge, non démuni et surtout exigeant, nécessite un changement des mentalités. Les personnes âgées voudront et, par manque d’infrastructures, devront être maintenues à domicile. Tout devra être fait pour les aider à préserver leur autonomie. Les services de proximité, qui répondent aux nécessités de la vie quotidienne (hygiène, santé, nourriture, adaptation des logements), devront se conjuguer avec des services de loisirs et de formation.
En effet, les personnes âgées s’inquiètent dès la fermeture des services sociaux, après 17 heures ou pendant les week-ends. Elles ne savent pas qui appeler en cas de besoin. Évier bouché, plombs qui sautent, fuite d’eau, etc., autant de petits problèmes techniques qui peuvent virer au cauchemar. Pour ce genre d’incidents, la plupart des artisans refusent de se déplacer ou interviennent pour un prix excessif. La nature des services à domicile nécessaires aux personnes âgées risque donc de devenir un sujet préoccupant en France et également en Europe, car la prise en charge par la famille recule fortement alors que le nombre des personnes âgées augmente.
Il convient aussi de réaliser que, pour certains, la réalité du troisième âge, et surtout celle du quatrième âge, est loin d’être idyllique. En effet, « retraite aisée ne rime pas toujours avec vieillesse heureuse », comme conclut un sondage réalisé par l’Insee en avril 1996, et dont les éléments nous permettent d’identifier les problématiques soulevées. L’image du retraité jeune, dynamique, sportif, qui voyage, masque quelquefois une autre réalité de la vieillesse, celle du grand âge, associée à la dépendance et à l’isolement. Cette population a évidemment des besoins très différents : une grande partie d’entre elle est déjà entrée dans une phase de dépendance physique qui exige des soins médicalisés lourds. Un tout autre « marché » pour les concepteurs de résidences et les prestataires de services.

La solitude

À partir de 51 ans, la proportion de femmes vivant seules progresse très sensiblement et se situe de plus en plus au-dessus de celle des hommes. Le point culminant se situe à 85 ans. À cet âge, plus d’une femme sur deux vit seule mais seulement près d’un homme sur quatre. Au-delà, les personnes âgées vivent de plus en plus en institution. Au total, plus de la moitié des personnes vivant seules ont plus de 55 ans. L’isolement affecte surtout les femmes. On compte, selon l’Insee, 2 millions de femmes seules âgées de 65 ans et plus, contre 500 000 hommes (il y a donc quatre fois plus de veuves que de veufs). Sept personnes âgées de 65 à 69 ans sur dix vivent en couple, contre trois sur dix au-delà de 80 ans.
Quand le conjoint a disparu, il reste la famille, parfois. Mais 26 % des personnes âgées vivant en milieu urbain et 16 % des ruraux n’ont pas d’enfant. D’ailleurs, même des parents de familles nombreuses peuvent parfois se retrouver seuls, si leurs enfants se sont expatriés pour des raisons professionnelles. Chez les personnes seules âgées de 85 ans et plus, l’impression d’inutilité s’accroît, d’autant plus qu’à 88 ans, une femme sur trois et un homme sur quatre sont en situation de dépendance.

L’adaptation du logement

La question du logement est particulièrement délicate et constitue une inquiétude pour les plus de 60 ans. Elle a un rapport direct avec la solitude, car déménager c’est risquer de perdre ses relations de voisinage, mais rester dans un logement inadapté implique aussi que l’on ne puisse plus en sortir, que l’on y soit en quelque sorte cloîtré. La plupart du temps, à cet âge, la stabilité dans le logement est grande, puisque seulement 8 % des personnes interrogées ont déménagé dans les cinq années précédant l’enquête. Par ailleurs, 97 % des personnes sont satisfaites de leur aménagement. Pourtant, pour plus d’un tiers des personnes rencontrées, le logement actuel ne serait pas adapté à leur perte d’autonomie. Quant à l’entrée en maison de retraite, elle demeure très redoutée. Pour 31 % des intéressés, c’est une solution « qu’il faut éviter à tout prix ».

La peur de la maladie

Les pathologies liées à l’âge résultent avant tout des conditions de vie. La société se voit, par exemple, confrontée à des pathologies nouvelles. Naguère, les diabétiques, les cardiaques, les obèses et autres malades étaient condamnés à court ou moyen terme. Ainsi, l’augmentation de l’espérance de vie ne correspond pas toujours à l’augmentation de la qualité de la vie.

1.2 - Longévité et dépendance croissantes

Handicap, invalidité, incapacité..., autant de termes désignant traditionnellement les maux de la vieillesse. Il est aujourd’hui communément admis de remplacer ces termes par le concept de dépendance, qui désigne l’incapacité d’accomplir seul les actes de la vie quotidienne.
La France compte actuellement 850 000 personnes dépendantes de plus de 60 ans aidées par un tiers pour se lever du lit ou du fauteuil, pour se laver ou pour s’habiller. Compte tenu de l’évolution démographique et de l’allongement de la durée de vie moyenne, ce chiffre devrait dépasser un million de personnes d’ici quinze ans et continuer à progresser fortement jusqu’en 2040. Ces personnes sont souvent des femmes très âgées vivant seules ou en cohabitation.
Ainsi, on utilise aujourd’hui la notion d’espérance de vie sans incapacité (EVSI).
Les gains d’espérance de vie sans handicap ou incapacité sont légèrement supérieurs aux gains d’espérance de vie totaux.
La baisse de mobilité et de force physique due au vieillissement entraîne d’autres incapacités : 33 % des octogénaires sans conjoint ne feraient jamais leurs courses, 15 % ne prépareraient pas leur repas, 25 % ne feraient pas leur ménage et 65 % ne s’occuperaient pas du gros entretien.
Les personnes de plus de 80 ans sont également très nombreuses à demander l’aide d’un tiers pour effectuer leurs démarches administratives : 69 % des personnes sans conjoint, 75 % des veuves.
D’après un sondage réalisé en 2005 par le groupe AGF avec Ipsos, les deux tiers des Français s’estiment assez bien ou très bien informés sur les risques liés à la dépendance. Simultanément, quatre personnes sur dix ont dans leur entourage proche une personne âgée en situation de perte d’autonomie physique ou psychique. Les Français ont conscience que la perte d’autonomie nécessite la mise en place de multiples services et pensent, dans 70 % des cas, être incapables de faire face aux frais de vie supplémentaires qu’ils auraient à payer s’ils devenaient dépendants. L’aspect financier du problème de la dépendance est donc primordial. Pourtant, les trois quarts des Français de plus de 45 ans ne l’ont pas anticipé par une épargne spécifique. En la matière, les hommes (80 %) négligent encore plus le problème que les femmes (74 %). Au total, les deux tiers des Français de plus de 45 ans ont conscience que leur épargne ne suffira pas à faire face. Par ailleurs, les Français se font peu d’illusions sur l’efficacité de la solidarité pour les aider en cas de dépendance. 72 % des 45 ans et plus pensent que leur famille ne sera pas en mesure de les prendre en charge. Ils sont 75 % de la même tranche d’âge à estimer que l’aide de l’État ne sera pas non plus suffisante. Le surcoût réel moyen de la dépendance varie entre 900 et 2 300 euros par mois. Pour la majorité des Français, ces frais supplémentaires ne peuvent être financés ni par leurs revenus, ni par leur épargne, ni par l’aide de l’État ou l’aide de leur famille.

1.3 - Une situation matérielle contrastée

Un bilan globalement positif

Indéniablement, la situation matérielle des personnes âgées n’est plus comparable à ce qu’elle était dans les années 70. Selon l’Insee, les pensions de retraite ont progressé de 13,6 % en francs constants entre 1997 et 2001. Autre indice confirmant cette amélioration globale de leur niveau de vie : la diminution du nombre d’allocataires du minimum vieillesse, créé en 1956, et s’appliquant aux personnes âgées de plus de 65 ans (voire plus de 60 ans en cas d’incapacité au travail), disposant de faibles ressources et résidant en France. Ce minimum se compose de trois éléments : la retraite, même très faible, le complément de retraite (les deux réunis formant l’allocation de base), et l’allocation supplémentaire (ex-FNS). Additionnés, ils constituent un niveau de ressources minimal, appelé minimum vieillesse, perçu actuellement par plus de 900 000 retraités. Le montant garanti par le minimum vieillesse est de 7 323,48 euros par an et par personne au 1er janvier 2006 (13 137,69 euros pour un couple). Une réforme du minimum vieillesse est actuellement en cours. En effet, l'ordonnance n° 2004-605 du 24 juin 2004 simplifiant le minimum vieillesse a institué, à compter du 1er janvier 2006, une prestation unique et différentielle, l'allocation de solidarité aux personnes âgées (Aspa), sur le modèle du revenu minimum d'insertion (RMI). Le montant de cette prestation est ainsi égal à la différence entre le montant des ressources propres de la personne et le montant du minimum de ressources garanti aux personnes âgées. Pour les nouveaux bénéficiaires, l’Aspa se substitue aux différentes allocations du minimum vieillesse. Un régime transitoire a été mis en place au début de l’année 2006, dans l’attente du décret d’application de mise en oeuvre de cette réforme. Les titulaires des anciennes prestations continueront à les percevoir selon les règles antérieurement applicables.
Le pouvoir d’achat des retraités a été multiplié par sept en vingt ans. En revanche, ils consomment environ 5 % de moins que l’ensemble de la population. Les seniors sont des consommateurs réfléchis ; ils n’ont pas besoin de produits nouveaux dans leur vie quotidienne, bien qu’ils n’y soient pas réticents. La génération des 60-75 ans représente 35 % du marché du voyage et 80 % de la clientèle des croisières. Alimentation saine, voitures neuves, les seniors sont également mieux équipés que la moyenne de la population en télévisions, congélateurs et lave-vaisselle. Ils arbitrent leurs dépenses avec discernement, dépensent beaucoup en communication (télévision, caméra vidéo) et se sont lancés sur Internet, qui connaît un taux de croissance deux à dix fois plus rapide que pour les autres tranches d’âge. Une grande partie du pouvoir d’achat des seniors est consacrée aux petits-enfants (voir l’annexe n° 1 sur la structure des dépenses).

Des disparités marquées

Ces données optimistes ne doivent cependant pas masquer l’accroissement des difficultés que rencontrent des milliers de retraités. Alors qu’aujourd’hui, les trois quarts des portefeuilles boursiers sont détenus par des plus de 60 ans, et que 22 % du revenu national et les deux tiers du patrimoine privé leur appartiennent, le troisième âge n’est pas toujours aisé pour autant. En effet, 500 000 à 600 000 retraités touchent environ 718 euros par mois. Et 472 000 personnes de plus de 60 ans vivent sous le seuil de pauvreté (627 euros en 2002).
Selon les derniers chiffres de la Cnav (Caisse nationale d’assurance vieillesse), pour la durée d’activité maximale tous régimes (variable selon la génération, compte tenu de la réforme de l’assurance vieillesse en 1994), la pension moyenne annuelle est de 7 580 euros et, pour les retraités qui justifient de 37,5 ans et plus d’assurance au régime général, le salaire moyen étant de 21 585 euros la pension moyenne est de 10 793 euros. À ces retraites, s’ajoutent les retraites complémentaires distribuées selon les régimes de cotisation propres à chaque activité. Ces chiffres moyens cachent de fortes disparités. Les retraités d’Île-de-France, par exemple, ont une retraite moyenne supérieure d’environ une fois et demie à celle de la région Basse-Normandie. L’autre facteur de disparité réside dans les catégories socioprofessionnelles dont sont issues les personnes retraitées. Les pensions les plus basses concernent les anciens agriculteurs, avec une retraite inférieure de 50 % à la retraite moyenne. Les anciens cadres disposent des retraites les plus élevées, 2 500 euros en moyenne en Île-de-France.
Les hommes disposent d’une retraite moyenne presque deux fois supérieure à celle des femmes, même si cet écart tend à se resserrer, conséquence de l’accroissement du niveau de qualification de celles-ci et de leur accès à des emplois plus rémunérateurs. L’explication réside dans les disparités entre générations (la surreprésentation des femmes parmi les plus âgées) et, surtout, les inégalités de salaires et de carrières professionnelles, en termes de professions exercées et de durées. La diversité des niveaux de retraite entre générations reflète en partie la modification de la structure de la population active (notamment l’augmentation du salariat et la diminution du nombre d’agriculteurs) au cours des soixante dernières années.
À ces retraites, il convient d’ajouter d’autres sources de revenus. Ainsi, les revenus de la propriété constituent 10 % des ressources de l’ensemble des plus de 60 ans ; si l’on se réfère à l’enquête du Sesi (Service des statistiques, des études et des systèmes d’information, du ministère de la Solidarité et de l’Emploi), la part de ces revenus atteint 16,4 % pour les anciens agriculteurs, 34 % chez les retraités des affaires et 8,8 % seulement chez les anciens salariés. Le bilan économique du troisième âge est donc très contrasté et les grandes perdantes sont les femmes très âgées, dont la plupart n’ont pas été salariées assez longtemps pour bénéficier de la retraite, d’où une forte proportion de femmes très âgées ne disposant que du minimum vieillesse pour survivre. De plus, le troisième âge est beaucoup plus aisé que le quatrième âge, où l’on trouve beaucoup de personnes relevant davantage de l’aide sociale. Ces dernières ont besoin de services, mais ne peuvent les financer.

2 - Services à domicile ou hébergement collectif : un choix de société

2.1 - Des polémiques passionnelles

La prise en charge de la vieillesse par la collectivité suscite d’innombrables débats. Faut-il opter pour le maintien à domicile aussi longtemps que possible, en privilégiant les services de proximité, ou vaut-il mieux prévoir des structures adaptées à l’inéluctable dépendance ? Selon certains, la personne âgée préfère, presque toujours, rester chez elle, où elle a ses repères, ses amitiés, ses soutiens. D’autres défendent la thèse inverse, et pensent qu’une personne âgée, seule 24 heures sur 24, ne peut vivre dans des conditions de confort et de sécurité optimales. Débat difficile à trancher. Peut-être faut-il simplement en conclure que les services à domicile sont aussi nécessaires que les résidences, pour le bien-être des personnes âgées et selon la situation personnelle de chacune.
Une étude réalisée pour la Fédération hospitalière de France, par la Sofres, révèle que les Français émettent, à une courte majorité, une opinion positive sur les maisons de retraite, mais qui ne progresse pas : 51 % en 2003, 53 % en 2004, 52 % en 2005. Par ailleurs, cette opinion est très homogène selon les catégories sociales : elle est un peu meilleure chez les plus âgés (57 % chez les 65/74 ans, et 55 % chez les 75 ans et plus), les sympathisants de droite (58 %), les ruraux (58 %) et un peu moins bonne chez les cadres, les sympathisants de gauche, les Parisiens. De fait, les motivations du choix de la maison de retraite, de préférence au maintien à domicile, font apparaître la première comme une solution pragmatique aux yeux des Français, mais peu séduisante. La maison de retraite semble en effet préférable à une majorité de Français, pour des questions de sécurité (57 %), et de rupture de l'isolement (55 %) ; en revanche, le maintien à domicile est perçu comme une meilleure solution dès lors qu'il s'agit d'être bien traité (62 %), ou d'avoir une vie agréable (75 %). Les avis sont partagés pour ce qui concerne les soins (44 % en faveur de la maison de retraite, 45 % en faveur du maintien à domicile). Enfin, plus on avance en âge, et plus rester chez soi semble la meilleure solution.
La maison de retraite apparaît comme une solution préférable plutôt aux enfants qu'aux personnes âgées elles-mêmes, et reste une solution par défaut, dont le principal atout est d’assurer une sécurité minimale, mais qui ne va pas jusqu'à intégrer des notions de confort, de qualité (des soins/des traitements) ou d'agrément. Cependant, lorsque les personnes âgées, du fait de l’apparition de troubles cognitifs type démence, perdent leur capacité à décider pour elles-mêmes, le maintien à domicile devient plus difficile et surtout moins approprié. Il existe en principe en ville tous les outils ou services qui permettent d’assurer au domicile des prestations équivalentes, voire supérieures, à celles que l’on peut trouver en maison de retraite ou à l’hôpital, et ce pour un coût moindre sauf situations de handicap très lourd. Mais ces services sont souvent quantitativement insuffisants ou mal répartis. Et ils sont surtout d’une mise en oeuvre complexe et le plus souvent mal coordonnée. C’est là que le développement des services à la personne au domicile peut trouver à s’accomplir.

2.2 - Les enjeux économiques et sociaux

De leur côté, les pouvoirs publics se posent la question du choix entre maintien à domicile ou hébergement collectif en termes de coût pour la collectivité, d’enjeu électoral et de gestion de la ville. En 1982, la décentralisation a renforcé l’autonomie des régions, qui jouent à présent un rôle décisif dans la prise en charge des personnes âgées et tentent de répartir cette charge au mieux. L’hébergement collectif a longtemps été considéré comme la seule réponse possible à la dépendance due à la vieillesse. La solution des soins à domicile est ensuite apparue plus économique et humainement plus satisfaisante, présentant, en outre, l’intérêt de constituer un bassin d’emplois potentiels. Mais le maintien à domicile a ses limites et, au-delà d’un certain degré de dépendance, il semble bien que l’hébergement en structure spécialisée soit la solution la plus rationnelle et la moins coûteuse. En particulier, lorsque le logement individuel ne présente pas les équipements nécessaires à un confort minimal. En règle générale, le logement des plus de 60 ans est plus vaste que celui des plus jeunes, mais les fameux logements 1948, vastes et peu confortables, peuvent se révéler invivables au-delà d’un certain âge. À Paris, 30 % des personnes âgées vivent au quatrième étage ou plus haut, sans ascenseur.

2.3 - Secteurs associatif et privé

Les atouts du secteur associatif

L’offre en matière de résidences et de services au troisième âge relève, en majorité, du domaine associatif. Cette particularité s’explique, sans doute, par l’histoire du traitement social de la vieillesse en France : « monopole » des institutions religieuses durant plusieurs siècles, la prise en charge des personnes âgées est ensuite revenue à l’État, qui a partiellement délégué cette mission aux associations caritatives ou humanitaires ; lesquelles sont, depuis les lois de décentralisation, étroitement contrôlées par les conseils généraux. Longtemps le secteur privé a fait figure de nouveau venu, voire d’intrus. Aujourd’hui, privés et associatifs se livrent toujours une concurrence farouche.
Le tissu associatif, souvent mis à contribution par les organismes publics, jouit de très nombreux atouts. D’abord parce que le terme même d’association loi 1901 à but non lucratif rassure les personnes âgées souvent méfiantes vis-à-vis du secteur privé ; ensuite, parce que la devise Time is money s’applique mal à la clientèle du troisième âge. En effet, si les « jeunes retraités » sont généralement rompus à cette approche directe, la plupart des anciens restent fidèles à une autre conception du temps et de l’argent. Qu’elles vivent seules ou dans des structures d’hébergement collectif, les personnes âgées sont, avant tout, demandeuses de temps, d’attention et de considération. Autant de services difficilement monnayables et que les structures associatives sont sans doute les plus aptes à assumer. Les associations insistent sur l’aspect humanitaire et non lucratif de leurs activités, sans doute parce qu’il constitue leur meilleur argument de vente. Même si la différence entre une association à but non lucratif et une PME classique est assez peu marquée : la première est tenue de réinvestir, en fin d’année, tous les bénéfices réalisés pour développer sa structure ; l’entreprise privée, elle, répartit en principe ce bénéfice entre les différents associés de la société (elle choisit bien souvent, dans les faits, de le réinvestir). Les unes comme les autres raisonnent en termes de marché à conquérir, de développement et de création d’emplois. Les patrons du privé s’offusquent des dispositions particulières accordées aux associations qu’ils qualifient parfois de « concurrence déloyale ». De fait, les associations estampillées « à but humanitaire » ou « d’utilité publique » disposent d’une ressource inconnue des SARL : elles peuvent recevoir des dons, déductibles du montant imposable du donateur. Outre ces dons individuels en nature, elles bénéficient parfois de la générosité d’entreprises privées, souvent sous la forme de véhicules ou d’autres subsides en nature. Enfin, les associations obtiennent des subventions bien plus importantes que les entreprises du secteur marchand. C’est ainsi que certaines associations peuvent annoncer des tarifs horaires de 11 à 15 euros, quand des sociétés privées facturent des prestations similaires à 20 euros.

Les contraintes des établissements semi-privés

En ce qui concerne les établissements exploités par une personne privée, les frais financiers, les dotations aux comptes d’amortissement et aux comptes de provision ne peuvent être pris en compte dans la dotation globale ou dans le prix de journée qu’à certaines conditions :

- l’organisme gestionnaire est une fondation, un groupement mutualiste, une association reconnue d’utilité publique ou une congrégation ;
- s’il s’agit d’une association privée, à condition que ses statuts prévoient, en cas de cessation d’activité, la dévolution de l’établissement à une collectivité publique ou à un organisme privé poursuivant un but similaire ;
- si, à défaut de l’existence de ces statuts, l’organisme gestionnaire s’engage en cas de cessation d’activité à verser, à un établissement public ou privé poursuivant des buts similaires, le fonds de roulement et les provisions non dépensées ainsi qu’une somme correspondant à la plus-value immobilière résultant des dépenses couvertes par la dotation globale ou par le prix de journée.
En d’autres termes, un établissement, même privé, subventionné par les deniers publics, ne saurait être considéré comme un patrimoine privé : en cas de cessation d’activité, l’établissement sera repris par un organisme public ou privé agréé, voire choisi par le préfet.

L’offre privée : un secteur destiné à se développer

En ce qui concerne les services à domicile, l’offre privée tend à se faire une place dans un milieu où, il y a peu encore, le monde associatif régnait en maître. Les dispositions gouvernementales inscrites dans un vaste plan de cohésion sociale né en 2005, se veulent incitatives à la création d’entreprises dans ce domaine. Le secteur privé se développe à une allure vertigineuse puisque de 130 entreprises privées en 2000 (avec 3 500 salariés), on passe à 700 au début de 2006 (avec 30 000 salariés). Et le mouvement ne fait que s’amorcer.
En matière d’hébergement collectif, l’offre privée a peu à peu pris le relais des institutions publiques. Quelques chiffres témoignent de la prospérité de ce secteur : en 1992, les établissements privés à but lucratif, relevant du droit commercial, représentaient 20 352 lits. En 2001, ils en comptaient environ 72 000.
Les entrepreneurs individuels se trouvent confrontés à plusieurs difficultés : d’une part, les conseils généraux se montrent très pointilleux, voire hostiles, à accorder une autorisation d’ouverture ; d’autre part, les normes de sécurité sont très contraignantes et drastiques. Les entreprises privées d’accueil résidentiel n’ont guère de chance de prospérer qu’en visant une clientèle « haut de gamme » qui existe, certes, mais n’en est pas moins minoritaire. À terme, ce positionnement « haut de gamme » s’avère difficile à tenir et les SARL trouvent souvent plus sûr de recourir aux subsides du département, pour assurer leur trésorerie, malgré les contraintes que suppose le recours à l’aide sociale.

3 - Les services à domicile

Une étude de l’Ifop réalisée à la demande conjointe de l’APCE et de Réseau+, en janvier 2005, livre une appréciation très encourageante pour les créateurs d’entreprise dans ce secteur : « ...Si 67 % des Français sont actuellement utilisateurs de services à domicile au moins ponctuellement, ils seraient 91 % à y recourir demain. Cette progression de 24 % porte certes sur des intentions et non sur des réalités d’utilisation, mais il convient de noter que 80 % de ceux qui envisagent d’utiliser des services à domicile alors qu’ils ne le font pas actuellement se déclarent “ certains ” d’y faire appel, ce qui démontre l’existence d’une vraie “ tendance lourde ”. On constate par ailleurs que l’attractivité des services à la personne est globale, les Français qui utilisent en moyenne 1,6 service différent aujourd’hui ayant l’intention d’en utiliser 2,6 demain, soit un quasi-doublement. »
Les six services les plus utilisés actuellement le seront encore demain : le segment du bricolage et des petites réparations en tête (30 % d’utilisateurs) conserverait la première place avec 38 %, devant l’ensemble repassage et couture qui passerait de 18 à 24 %. En troisième position avec 13 % d’utilisateurs, le ménage conserverait son rang avec 24 % d’utilisateurs, devant la livraison de courses (22 % contre 13 % actuellement), la livraison de repas (21 % contre 13 %) et les soins de beauté à domicile (17 % contre 13 %). Parmi ces six marchés majeurs, trois devraient enregistrer des croissances très fortes : le ménage (+ 77 %), la livraison de courses (+ 69 %) et la livraison de repas (+ 62 %). Les plus fortes progressions d’intentions d’utilisation d’un service à domicile concernent les prestations qui vont accompagner les mutations de la famille. L’aide pour les personnes âgées ou handicapées, qui n’est utilisée que par 6 % des Français aujourd’hui, aurait ainsi 20 % d’utilisateurs demain, soit une progression de 233 %. D’autre part, dans un communiqué du 7 mars 2005 consacré au lancement d’une campagne d’information sur les métiers liés à l’aide aux personnes âgées, la secrétaire d’État aux personnes âgées estimait que « seulement 30 % des besoins déclarés par les personnes âgées sont satisfaits ».

3.1 - À chaque âge ses services

Le troisième âge, surtout s’il est aisé, constitue par définition une clientèle pour toutes sortes de services. Les retraités valides et aisés représentent une clientèle toute désignée pour les agences de voyages spécialisées, les sociétés de gardiennage, les services de repas à domicile, l’apprentissage de l’informatique au domicile, etc., mais ils ne présentent alors aucune spécificité et sont des clients parmi d’autres de ces services. En revanche, mettre en place des services spécifiquement conçus pour les personnes âgées dépendantes suppose de répondre à une logique qui n’est plus exclusivement commerciale. Les pouvoirs publics, en instituant des procédures d’agrément « qualité » pour les services apportés aux plus de 60 ans, entérine cette distinction entre services à la personne et services aux personnes âgées, ces dernières étant censées représenter une population fragilisée, dépendante ou handicapée. La classification retenue par la Commission européenne distingue quatre grandes familles de services de proximité aux ménages :

- les services de la vie quotidienne ;
- les services d’amélioration du cadre de vie ;
- les services culturels et de loisirs ;
- les services d’environnement.

Les idées de services sont nombreuses et correspondent à autant de besoins et d’aspirations réels. La création de services au troisième âge est certainement un secteur porteur, à condition de s’adapter à la demande locale et de savoir présenter son projet non seulement à des banquiers, mais à des caisses de retraite, des organismes humanitaires, des commissions départementales d’aide sociale ou des municipalités.

3.2 - Les impératifs du maintien à domicile

Le vieillissement et les pertes de capacités physiques ou psychiques qu’il entraîne, à des degrés plus ou moins importants, rendent nécessaire la mise en place d’un dispositif coordonné de prise en charge, fondé sur une approche globale de la personne âgée dans son environnement, articulant le volet soins et la réponse sociale et culturelle. Il est néanmoins capital de distinguer les services selon le degré de dépendance de la personne à laquelle ils s’adressent, dépendance qui se traduit par un besoin d’intervention globale. De ce fait, un service d’aide à domicile est rarement seul à intervenir. 80 % des bénéficiaires d’une aide à domicile reçoivent l’aide ou les soins d’autres intervenants professionnels ou informels ; un quart est pris en charge par plus de six intervenants. La frontière entre les actes relevant d’un personnel soignant et ceux qui peuvent être effectués par une aide à domicile est parfois difficile à définir, tant il est malaisé de faire la différence entre pathologie et dépendance. Les actes techniques prescrits par un médecin et les soins infirmiers d’hygiène relèvent de la compétence de personnels soignants. Ces soins sont assimilés aux SSIAD (services de soins infirmiers à domicile) : services créés par la loi du 30 juin 1975 (décrets du 8 mai 1981 et du 25 juin 2004) destinés à apporter, sur prescription médicale, des soins à domicile aux personnes âgées et handicapées, en même temps que des soins d’hygiène générale et une aide à l’accomplissement des actes essentiels de la vie. Néanmoins, la répartition des compétences pour les actes d’hygiène simples (aide à la toilette et aux fonctions d’élimination) et l’aide aux actes essentiels de la vie quotidienne reste floue, malgré certains efforts de clarification.
Au cours des années 80, la société civile, au sens large du terme, a multiplié les initiatives visant à faciliter le maintien à domicile des personnes âgées (intervention d’une aide ménagère quotidienne, fourniture de soins corporels, séances de kinésithérapie, mise en place de systèmes de téléalarme, portage des repas à domicile…). Autant de services qui peuvent, effectivement, contribuer à une véritable protection sociale du troisième âge. L’important est de rechercher la qualité des prestations, via notamment une meilleure considération des personnes, et de changer son regard sur l’allongement de la vie.
L’accompagnement et le transport restent des problèmes importants. De plus, il existe des besoins en matière de petit artisanat (travaux divers dans la maison). Il s’agit aussi d’être capable de dépêcher des prestataires lorsqu’une personne est en situation d’urgence. Michel Mazet (voir interview chapitre 3) estime quant à lui offrir un service qui répond au désir des personnes âgées : que la même personne soit présente, jour après jour, à l’heure convenue, et mette ses compétences techniques au service du client. Il ne s’agit pas seulement d’offrir, comme le font de nombreux prestataires, le traditionnel service d’aide ménagère, mais d’accompagner la personne âgée dans tous les gestes de son quotidien. Aider une personne, parfois invalide, à se lever et à s’habiller, la soutenir, l’accompagner à l’extérieur, savoir l’écouter, lui parler, tout ceci relève d’un accompagnement qualifié et attentif, pour lequel il est indispensable de disposer d’un personnel ayant suivi une formation adaptée pour l’aide à domicile. Il est également préférable que votre société soit encadrée par un professionnel de la santé diplômé d’État. En outre, il est utile de mettre en place un plan d’accompagnement personnel en collaboration avec les services sociaux, les membres de la famille et la personne concernée. Si vous pouvez établir une charte reconnue par le ministère de la Santé et de l’Action sociale, c’est encore mieux.

3.3 - Services et modes de financement complexes

Les dépenses réalisées pour les services d’une aide payante ne correspondent pas toujours aux montants effectivement perçus par les prestataires de services. En effet, une partie des heures d’intervention est, sous réserve de ressources et de dépendance, partiellement ou totalement financée par les caisses de retraite, les conseils généraux ou l’assurance-maladie.
Au coût total de l’aide ménagère (ménage, repas, assistance, etc.) restant à régler en fonction du degré de prise en charge, il faut ajouter les services de soins corporels quotidiens, les honoraires des kinésithérapeutes et des médecins ou infirmiers passant au domicile de la personne âgée deux fois par semaine. Au total, on peut arriver à une dépense de 1 200 à 2 000 euros par mois selon les ressources. Et jusqu’à 3 000 euros si l’on doit faire appel à des gardes de jour et/ou de nuit.
Les personnes âgées imposables bénéficient également d’avantages fiscaux lorsqu’elles font appel à des aides à domicile. Certaines sociétés s’en prévalent d’ailleurs dans leur approche commerciale en présentant des tarifs après déduction fiscale, afin de faire apparaître un taux horaire attractif.
Il vous faudra donc être sensible à ces points, comprendre que l’explosion des services cache des disparités à ne pas négliger et étudier cette toile de fond avant de vous lancer. Sachez que, malgré les diverses aides servies par les pouvoirs publics ou d’autres organismes, de nombreux services ont de réelles difficultés à se maintenir sur le marché. Néanmoins, dans le domaine des services à la personne, on peut espérer que le vaste plan initié par les pouvoirs publics, avec les incitations financières proposées, participera à la demande toujours croissante de services.

3.4 - Accompagner les services à la personne pour inciter à l’emploi.

Les pouvoirs publics semblent considérer les services de proximité en général, et ceux destinés au troisième âge en particulier, comme un bassin d’emplois potentiels. Une mesure adoptée il y a quatre ans a déjà incité au développement des entreprises et associations de services aux particuliers.
Ainsi, l’allocation personnalisée d’autonomie (Apa), instaurée le 1er janvier 2002 et revisitée par un décret du 28 mars 2003, vise à une meilleure prise en charge de la perte d’autonomie des personnes âgées pour accomplir les gestes ordinaires de la vie courante. Au 1er janvier 2006, le montant maximal mensuel du plan d'aide s'élève à : 1 168,76 euros pour un classement en GIR 1 – groupe iso ressources (première catégorie de la grille Aggir qui marque la plus grande dépendance) ; 1 001,80 euros en GIR 2 ; 751,35 euros en GIR 3 ; 500,90 euros en GIR 4. Toutefois, le montant attribué est variable, puisque sont prises en compte la situation et les ressources. En outre, les règles de calcul présentent des différences selon que la personne réside à son domicile ou en établissement. Enfin, une somme reste à sa charge (le « ticket modérateur ») sauf si ses revenus sont inférieurs à 658,04 euros par mois.
À domicile, l’évaluation du degré de dépendance et des besoins d’aide de la personne âgée est réalisée par l’équipe médico-sociale dépêchée par le conseil régional qui établit, en concertation avec le demandeur, un plan d’aide correspondant à la liste des besoins jugés nécessaires pour son maintien à domicile. Il s’agit d’heures d’aide (service de portage de repas à domicile, heures de garde…) ou de services (fauteuil roulant, lit médicalisé…) pour la part non couverte par l’assurance-maladie, ou encore de la réalisation de petits travaux d’aménagement du logement, du recours à un hébergement temporaire, à un accueil de jour, à un service de téléalarme…
L’aide dont a besoin le bénéficiaire de l’Apa à domicile peut lui être apportée soit par un ou plusieurs salariés directement (ou par l’intermédiaire d’un service mandataire) recrutés en tant qu’aides à domicile, soit par les salariés d’un service prestataire d’aide à domicile. Dans le premier cas, l’Apa est versée à son bénéficiaire dans des conditions lui permettant de ne pas faire l’avance des sommes dues au prestataire. Dans le second cas, elle est versée au service d’aide à domicile. L’aide à domicile peut être fournie par un membre de la famille employé comme salarié (sauf le conjoint ou le concubin). L’Apa ne peut être allouée afin de rémunérer une personne qui bénéficie déjà elle-même d’un avantage vieillesse. L’Apa peut aussi être versée au particulier qui accueille à titre onéreux à son domicile une personne âgée dépendante, et elle est ainsi affectée au paiement des services qu’il rend. Une partie de la prestation peut être utilisée pour d’autres dépenses, dans une limite de 10 % du montant maximal de l’allocation personnalisée d’autonomie. Il y a obligation, pour le bénéficiaire, de déclarer la personne ou le service auquel il a recours. Un contrôle de l’effectivité de l’utilisation de l’Apa est effectué à domicile au moins une fois par an.
Le développement des emplois familiaux a été favorisé par la loi n° 91-1405 du 31 décembre 1991, qui a donné droit à des avantages fiscaux. La loi n° 96-63 du 29 janvier 1996, établie en faveur du développement des emplois de services aux particuliers, a ouvert aux entreprises les avantages liés aux emplois familiaux. Les personnes âgées bénéficient également de déductions fiscales. Pour les dépenses engagées en 2005, la réduction d'impôt est égale à 50 % du montant des dépenses effectivement supportées, dans la limite d'un plafond annuel de 12 000 euros. Ce plafond est majoré de 1 500 euros par enfant à charge, pour chaque membre du foyer fiscal âgé de 65 ans et plus. Toutefois, le plafond augmenté de ces majorations ne pourra excéder 15 000 euros. Il sera porté à 20 000 euros si au moins l'un des membres du foyer fiscal est titulaire de la carte d'invalidité de 80 % ou d'une pension d'invalidité de 3e catégorie, ou si l’un des enfants à charge ouvre droit au complément d'allocation d'éducation spéciale.
Tout service d’aide à domicile peut être réglé au moyen du chèque emploi-service. Depuis janvier 2006, celui-ci, créé en 1993, tout comme le titre emploi-service, a été remplacé par le chèque emploi-service universel (Cesu), qui permet de rémunérer un ensemble de services à la personne. Le Cesu est diffusé par les établissements bancaires ayant passé une convention avec l'État. Le chéquier comprend des formules de chèques, à remplir comme un chèque bancaire ou postal, pour payer un organisme prestataire ou rémunérer un salarié employé par le particulier, et des volets sociaux pour déclarer les salariés à domicile. Le Cesu peut être utilisé par les particuliers pour payer : des organismes agréés (entreprises et associations) prestataires de services à la personne, un salarié employé par le particulier pour effectuer ces activités à son domicile, ou une structure mandataire agréée, chargée par le particulier employeur d'effectuer l'ensemble des formalités sociales (établissement du contrat de travail et des bulletins de paie ; calcul et déclaration des cotisations sociales correspondantes). Toutes ces mesures ont aussi pour but, affiché ou non, de réduire le « travail au noir », véritable concurrence à l’emploi salarié. On estime à 80 % la part de l’emploi non déclaré dans les services à domicile.

4 - L’hébergement collectif

4.1 - Les structures d’hébergement

Évolution des capacités installées entre 1996 et 2003
  Nb de structures Nb de places installées Évolution 03/96 Nb places (%)
Logements - foyers publics 2 069 108 200 2
Logements - foyers privés à but non lucratif 810 40 500 -7
Logements - foyers privés à but lucratif 97 4 200 -29
Total logements - foyers 2 975 152 900 -2
Maisons de retraite rattachées à un hôpital 1 080 100 800 2
Maisons de retraite privées à but lucratif 1 604 87 900 21
Maisons de retraite privées à but non lucratif 2 040 127 100 6
Maisons de retraite autonomes publiques 1 652 120 400 4
Total maisons de retraite 6 376 436 300 7
Résidences d’hébergement temporaire 131 2 400 -27
Unités de soins de longue durée 1 044 79 300 -3
Ensemble des établissements d’hébergement pour personnes âgées 10 526 670 900 4
Champ : France entière
Source : enquêtes EHPA, SAE, Drees


Consultez également en annexe 2 la répartition des taux d’équipement. Selon les données de l’enquête EHPA de la DREES, on comptait, au 31 décembre 2003, 10 526 établissements d’hébergement pour personnes âgées (EHPA) représentant 671 000 places (dont la quasi-totalité sont occupées : 95 %). Au total, le taux d’équipement – c’est-à-dire le nombre de places pour 1 000 personnes âgées de 75 ans et plus – s’élevait à 140 en 2003. Les groupes commerciaux qui, souvent, rachètent des établissements commencent à occuper une place significative. Les vingt premiers, dont certains cotés en Bourse, représentent plus du tiers de la capacité d’accueil. Cette enquête distingue quatre catégories principales d’établissements : les maisons de retraite, les logements-foyers, les unités de soins longue durée et les résidences d’hébergement temporaire :

- Les maisons de retraite sont des lieux d'hébergement collectif qui assurent une prise en charge globale de la personne, incluant l'hébergement en chambre (ou en logement), les repas et divers services spécifiques ; certaines sont rattachées à un hôpital public. Elles constituent la catégorie d’EHPA la plus importante en termes de structures (6 376) et de capacité d’accueil (436 300 lits, soit 65 % des places en EHPA). Elles offrent en moyenne 91 places pour 1 000 personnes âgées de 75 ans et plus. On peut noter aussi le rôle important du secteur privé (à but lucratif ou non) qui détient près de 60 % des maisons de retraite et offre près de la moitié des places disponibles. On agrège à cette catégorie les petites unités de vie comptant moins de 25 places, dont les 114 Marpa existant en 2004. Développées par la Mutualité sociale agricole (MSA), ces structures cherchent à préserver en zone rurale les liens du résident avec ses proches et son environnement.
- Les 2 975 logements-foyers représentent 23 % de l’offre d’hébergement, avec leurs 152 900 places. Ce sont des groupes de logements autonomes (parfois des chambres) assortis d'équipements ou de services collectifs. Ils sont destinés principalement à l’accueil des personnes âgées autonomes, plus de la moitié d’entre eux ayant prévu dans leur règlement de ne pas admettre de personnes dépendantes. On compte 32 places pour 1 000 personnes âgées en logements-foyers.
- Les unités de soins de longue durée (USLD) sont les structures les plus médicalisées et sont en particulier destinées à l’accueil des personnes les plus dépendantes. Ces unités sont en grande majorité dépendantes des services hospitaliers. Les 1 044 USLD regroupent 79 300 lits, soit 17 places pour 1 000 personnes âgées.
- De manière plus marginale, les 131 résidences d’hébergement temporaire proposent 2 400 lits. Ces résidences permettent à la personne âgée de faire face à des difficultés passagères telles que l'absence momentanée de la famille, l'isolement, la convalescence, ou encore l'inadaptation du logement en hiver.
Entre 1996 et 2003, le nombre global de places en EHPA a augmenté de 4 %, mais ce chiffre cache des dynamiques contrastées selon le type d’établissement. En effet, alors que le nombre de places en maisons de retraite connaissait une croissance importante (+ 7 %), le nombre de places disponibles dans les autres types de structures a diminué sur la même période (- 2 % pour les logements foyers, - 3 % pour les USLD et - 27 % pour les résidences d’hébergement temporaire). On peut souligner que ce contraste est particulièrement marqué pour le secteur privé à but lucratif : les logements-foyers de ce secteur perdaient 29 % de leurs capacités d’accueil mais les maisons de retraite privées à but lucratif augmentaient leur nombre de lits de 2 %.

4.2 - Un secteur porteur, mais difficile

Une population âgée de plus en plus nombreuse, dont les revenus s’améliorent et dont les besoins en matière d’hébergement sont appelés à croître considérablement dans les années à venir, bien au-delà des capacités d’accueil actuelles… À première vue, le secteur du troisième âge présente toutes les caractéristiques d’un marché porteur. Mais ces apparences se sont d’ores et déjà révélées trompeuses, voire fatales à des entrepreneurs imprévoyants.
Ces dernières années, le terrain est apparu économiquement porteur ; la profusion de données économiques livrées sur le sujet a coïncidé avec un certain mal-être du secteur médical et paramédical. Nombre d’infirmières libérales ou privées, de kinésithérapeutes ou de médecins au chômage ou insatisfaits de leurs conditions de travail ont pensé trouver dans la création de centres d’accueil du troisième âge une porte de sortie. Mais la plupart d’entre eux sont partis sur une base de calcul faussée, misant sur l’accueil de personnes âgées relativement valides. Or, les personnes âgées sont peu enclines à quitter leur domicile tant qu’elles peuvent y rester, et n’acceptent la solution de l’hébergement collectif qu’à un âge de plus en plus avancé. De sorte que des structures d’accueil se sont trouvées confrontées à une clientèle bien plus dépendante qu’elles n’avaient pu le penser.
« Ceux qui ont cru trouver un filon dans le secteur du troisième âge se sont trompés, estime un professionnel. Certes, pour un chef d’entreprise, une maison de retraite offre certains avantages indéniables : d’une part, c’est un secteur stable, où l’on peut, à condition d’assurer un service irréprochable, être sûr d’afficher complet en permanence, ce qui n’est plus toujours le cas dans la restauration ou dans l’hôtellerie. D’autre part, tous les frais de fonctionnement sont couverts dès la première semaine du mois. Un mode de fonctionnement bien pratique, à l’heure où les prestataires de services sont de plus en plus souvent confrontés à d’inextricables problèmes d’échéances. » Quelle que soit l’activité choisie, prendre en charge des personnes âgées est une activité complexe, que l’on ne saurait raisonnablement aborder sans une certaine expérience préalable et une volonté d’investissement personnel.
Créer une structure d’accueil pour personnes âgées suppose de s’entourer de personnes ayant des compétences en gestion, en restauration et en hôtellerie. En effet, la dimension sociale de cette activité implique un dispositif administratif et juridique complexe et contraignant, en particulier depuis la réforme 2000-2001. Enfin, la « clientèle » troisième âge ou encore quatrième âge présente d’incontournables particularités : la gestion d’une telle structure d’accueil demande de la psychologie, de la chaleur humaine, certaines exigences éthiques sans lesquelles il est préférable de choisir une autre activité. On pourra lire, à ce propos, la « Charte des droits et libertés de la personne âgée dépendante », établie en 1997 par le ministère de l’Emploi et de la Solidarité (cf. annexe 3).
Enfin, compte tenu des moyens financiers à mobiliser et de la professionnalisation d’un secteur de plus en plus surveillé par les pouvoirs publics, la sélection devient impitoyable parmi ceux qui envisagent de créer une résidence pour personnes âgées. Et les agréments sont délivrés au compte-gouttes par les conseils généraux.
Toutes ces conditions posent un préalable non négligeable au futur créateur : le montage d’un dossier de A à Z demande de deux à quatre ans de travail énergique. Et, dès l’ouverture de l’établissement, le créateur devra prévoir une publicité adéquate : le taux d’occupation de la résidence doit être maximal. Pour cela, il faut approcher les hôpitaux, passer des annonces dans la presse spécialisée, séduire les pharmaciens, les associations d’entraide aux personnes âgées, les Ddass, etc.

4.3 - Les droits des personnes âgées

L’hébergement collectif des personnes âgées a donné lieu à certains abus, voire à des faits divers. Les établissements où les vieillards furent mal nourris, maltraités, existent encore, et sont loin d’être anecdotiques. La prise de conscience de la maltraitance des personnes âgées est un phénomène émergent qui évolue rapidement et amène incontestablement à jeter un nouveau regard sur la personne âgée et à réévaluer la plupart des attitudes, des comportements, des procédures et des structures la concernant.
C’est sans doute pour prévenir ces mauvais traitements que la Fondation nationale de gérontologie a édicté, avec le ministère de l’Emploi et de la Solidarité, la « Charte des droits et libertés de la personnes âgée dépendante », définissant les principes essentiels du respect des personnes âgées, qui a pris valeur de référence dans tous les lieux de vie des personnes âgées : « La sécurité physique et morale contre toutes agressions et maltraitances doit être sauvegardée. Lors de l’entrée en institution privée ou publique ou d’un placement dans une famille d’accueil, les conditions de résidence doivent être garanties par un contrat explicite, la personne âgée dépendante peut avoir recours au conseil de son choix. Tout changement de lieu de résidence ou même de chambre doit faire l’objet d’une concertation avec l’intéressé. Lors de la mise en oeuvre des protections prévues par le Code civil (sauvegarde de justice, curatelle ou tutelle), il faut considérer avec attention que : le besoin de protection n’est pas forcément total, ni définitif ; la personne âgée dépendante protégée doit pouvoir continuer à donner son avis chaque fois que cela est nécessaire et possible ; la dépendance psychique n’exclut pas que la personne âgée puisse exprimer des orientations de vie et doive toujours être informée des actes effectués en son nom. » (Cf. annexe 3, Charte des droits et libertés de la personne âgée dépendante.)

4.4 - La maison de retraite vue par ses résidents

En septembre 2005, les membres de l'association VEDIBE, Vieillir dans la dignité et le bien-être, ont établi une synthèse des souhaits et des rejets exprimés par les personnes vivant en maison de retraite, afin de définir ce que serait la maison de retraite « idéale » (voir www.agevillage.com). Voici quelques extraits dont les futurs créateurs seraient bien inspirés de tenir compte.

La maison de retraite « idéale »

- Une maison proche des commerces et des services et le plus près possible des enfants ou de ma famille.
- Lorsqu’il frappe à ma porte, le personnel doit attendre que je dise « Entrez ». Je suis chez moi.
- Respecter l’adulte qui est en chacun de nous, avec son passé, son expérience et son histoire, et nous appeler par notre nom et non pas « papi et mami », surtout lorsque l’on n’a pas eu la chance d’être grands-parents.
- Ne pas m’imposer l’heure du lever. Proscrire les aberrations de certains horaires. Respecter mon rythme !
- Prévoir une pièce où les résidents puissent profiter des mouvements de la rue.
- Un vrai domicile spacieux pour y apporter quelques meubles personnels et s’y déplacer en fauteuil roulant.
- Me permettre de conserver un rôle social dans la famille et si possible dans le quartier. Ne pas être soudain abandonné par ceux qui partageaient avec moi une activité.
- La maison de retraite doit m’aider à me sentir utile jusqu’à ma mort, et ne pas freiner l’aide que je pourrais apporter aux plus handicapés.
- Pouvoir disposer d’un petit carré de jardin, d’un balcon pour y cultiver fleurs ou légumes, ou au moins pouvoir entretenir certains parterres.
- Participer à des activités culinaires et au choix des menus.
- Une animation qui ne s’impose pas mais dont le but est de favoriser la relation entre les résidents.
- Dans la salle à manger chacun doit pouvoir choisir sa table selon ses affinités.
- Pouvoir déguster des mets aux saveurs d’autrefois, et prohiber une réglementation sanitaire trop stricte.
- Les bénévoles qui passent dans les chambres doivent avoir un échange réel avec les résidents.
- Plus grande participation des familles : déjeuner entre familles, permanence familiale à roulement pour le week-end, ce qui permet de mieux comprendre le fonctionnement et de connaître les résidents.
- Faciliter les échanges entre les familles des résidents et faire de la maison de retraite une sorte de grande famille qui intègre les isolés.
- Liberté d’aller et venir, même en fauteuil roulant, y compris en ville. Le risque zéro n’existe pas et il n’y a rien de pire que d’être cloîtré.
- Avoir la garantie que tout sera fait pour assurer mon bien-être en fin de vie, grâce, notamment, à une équipe formée à l’accompagnement de fin de vie et aux soins palliatifs adaptés.
- Téléphone en ligne directe afin de permettre le choix de l’opérateur et un coût moins prohibitif.

La maison de retraite dont ils ne veulent pas

- Maison isolée, sans lien avec la vie extérieure.
- Un directeur sans qualification, ni qualités de cœur, que l’on ne voit jamais en dehors des grandes fêtes, et un personnel incompétent, sans vocation à travailler auprès des personnes âgées.
- Être traité comme un objet qu’on lave au même titre que les toilettes ou le mobilier de la chambre, et non comme un être humain qui a besoin d’entrer en communication et d’être respecté.
- Je refuse qu’on aliène ma liberté par un règlement trop strict.
- Je refuse que l’on m’impose des protections alors qu’il suffirait que l’on m’aide à aller aux toilettes pour que je ne devienne pas incontinent(e).
- Nous refusons d’être traités comme des enfants.
- Une maison qui me laissera mourir seul, sans la moindre attention, et pire encore, dans la souffrance.

4.5 - Les autres formules d’hébergement

D’autres structures d’hébergement échappent au terme générique de maison de retraite, en raison de certaines spécificités.

Les Cantous

Ces Centres d’animations naturelles tirées d’occupations utiles ont été créés en 1977, sous l’égide de la Fondation de France, pour venir en aide aux personnes âgées souffrant de troubles mentaux plus ou moins graves. Chacune de ces petites unités autonomes comprend douze chambres individuelles, avec, pour chacune d'elles, une salle de bains avec lavabo, un wc, une douche, réparties autour d'une salle commune. Les résidents vivent avec les maîtresses de maison (quatre par Cantou) et un personnel polyvalent qui les accompagne en évitant de se substituer à eux pour les actes qu'ils peuvent encore effectuer seuls. Le prix de journée est aux alentours de 55 euros. Il comprend la prise en charge de toutes les prestations, et ne comporte pas de supplément. Un dépôt de garantie équivalant à deux mois de pension est perçu à l'admission. Il est remboursé au départ ou en cas de décès.

Les résidences avec services

Développées à l'origine par des promoteurs privés, les résidences avec services s'adressent à une population aisée. La formule : des appartements groupés autour de services à la carte (blanchisserie, restauration, ménage, infirmière de garde...). Implantée en centre-ville à proximité de commerces et d'espaces verts, la résidence services offre un environnement qui se veut protégé et rassurant. Une grande partie de ces résidences sont des copropriétés (du studio au trois pièces), mais les locations existent aussi. Le prix est divisé en loyer (ou remboursement de crédit à la banque pour l'achat de l'appartement) et services, refacturés par le syndic ou par la société de gestion selon le degré de services.

L’hébergement à domicile

La loi du 10 juillet 1989 a clairement dressé le cadre de l'accueil familial pour mettre fin à un certain nombre d'abus. En effet, profitant du flou de la loi du 30 juin 1975 sur les institutions sociales et médico-sociales, nombre de maisons de retraite se sont développées en arguant de leur caractère « familial »... à seule fin de se soustraire à la procédure d'autorisation administrative réclamée par la loi. Pour mettre fin à ces dérives, la loi de 1989 a défini un seuil. Au-dessus de deux ou, exceptionnellement, trois personnes accueillies, tout hébergement de longue durée de personnes âgées relève de la loi de 1975 sur les maisons de retraite. Un particulier ne peut prendre en pension qu'une ou deux personnes âgées (sauf dérogation du président du conseil général). La loi de 1989 oblige l'accueilli et l'accueillant à contractualiser leurs relations par un contrat et a strictement encadré la rémunération de l'accueillant. Celle-ci comporte trois éléments distincts : la rémunération, l'indemnité représentative des frais d'entretien (chauffage, électricité...), et enfin le loyer. La rémunération est fixée par décret. Le conseil général de son côté fixera un plafond de rémunération globale que nul ne devra dépasser, sauf « sujétions particulières ». Ainsi, un surcroît de disponibilité de l'accueillant pour tenir compte de l'état de la personne âgée, ou aider celle-ci à accomplir certains actes de la vie courante, pourra ouvrir la porte à une majoration. L'indemnité représentative des frais d'entretien (nourriture, chauffage...) est aussi fixée par décret. Elle comprend un minimum journalier fixé à deux fois le minimum garanti, et un maximum fixé à cinq fois le minimum garanti.

Les « pensions de famille »

Ce terme correspond à une réalité formellement illégale pour l’hébergement des personnes âgées. Si tout un chacun est libre de transformer son spacieux pavillon en structure hôtelière, il est en revanche interdit d’héberger des personnes non autonomes ou susceptibles de perdre leur autonomie. En clair, tout établissement accueillant une personne incapable de subvenir elle-même aux besoins de la vie quotidienne – se mouvoir, s’alimenter, se laver sans aide – est passible d’une inculpation de non-assistance à personne en danger s’il arrive le moindre problème à son locataire. Cependant, quelques pensions de famille subsistent, loin de tout contrôle.



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